EQUIPAGE « PAR VAUX et FORETS » au Baron J.H. de Rothschild
(Chasse à Courre)


Equipage par Vaux et Forêts - 79.2 ko
Equipage par Vaux et Forêts
(JPEG, 79.2 ko)

Ayant eu, depuis son plus jeune âge, des maîtres tels que furent Mme la duchesse douairière d'Uzès, S.A. le prince Murat, le comte Bertrand de Valon, James de Rothschild fut élevé à grande école et s'efforce, son tour venu, de maintenir la tradition. Habit bleu de roi à la française, gilet, col, revers et parements bouton d'or, avec galon de vènerie, telle est la tenue de l'équipage. Hommes impeccables, chevaux magnifiques, harnachements reluisants, meute peut-être pas très homogène, mais nombreuse et excellente, tout, jusqu'à la Darboulin, attelée d'une belle postière grise, grelottière au cou, queue de cheval au frontal, offre un ensemble des plus plaisants. Une camionnette conduit les chiens au rendez-vous, ramasse en route les éclopés, donne à point le ou les relais. En prévision des bats-l'eau un robuste bachot à fond plat fait partie du train de combat. Tout enfant, J.H. de Rothschild suivit quelques chasses de Mme la duchesse d'Uzès, dont il portait déjà la tenue aux jours de ses congés scolaires. Dès la fin de la guerre 14-18, il suit avec fougue l'équipage de la duchesse, en Rambouillet, achète deci-delà une quarantaine de chiens, qui, sous la conduite de Jobert, prennent leur premier cerf le 30 décembre 1922, alors que la meute de Bonnelles est presque entièrement décimée par la pneumonie. La duchesse offre au jeune veneur quelques uns de ses cerfs de Rambouillet, qu'il se chargera de prendre par ses propres moyens en début de saison. A partir de 1923, le jeune équipage définitivement constitué sous le nom de « Par vaux et Forêts », chasse régulièrement en forêt de Carnelle et de l'Isle Adam, de concert avec Rallye Chambly au Prince Murat et également en Compiègne, Laigue et Ourscamp avec le Comte de Valon. En 1925, après la mise bas du Rallye Chambly, J. de Rothschild prend la suite du Prince Murat qui lui a cédé droits et chiens. Pendant les années suivantes, l'équipage chasse en octobre à Rambouillet, puis en l'Isle Adam, Carnelle, Montmorency. Dès janvier en Compiègne, en association avec le comte de Valon. En 1927, les sangliers faisant de nombreux ravages, J. de Rothschild se décide à monter un vautrait, tout en conservant son équipage de cerf. Il achète des fox-hound en Angleterre. Ceux-ci prennent leur premier sanglier le 27 avril 1927, le jour de leur première sortie. A la fin de mars 1932, date à laquelle le vautrait fut dispersé en vente publiques quatre-vingt-huit sangliers avaient été forcés. Le 12 février 1929, J.H. de Rothschild se rend adjudicataire de la forêt de Compiègne. La saison suivante, après entente amicale, le baron de Rothschild chasse seul en forêt de Compiègne. Il renoncera même aux cerfs de Rambouillet en début de saison. L'équipage se fixe définitivement à Compiègne. Par « Vaux et forêts » est servi par le Maître d'équipage lui-même, un piqueux, deux valets de chiens à cheval et un nombreux personnel subalterne. Jobert (qui ne monte plus) et La Trace sont gens de vènerie de premier ordre. (extrait de la Vènerie anecdotique de René de Martimprey 1937). On peut ajouter que J. Carle (blessé mortellement par un cerf en Halatte vers 1955), Lefort, Labasque, Larosée et Labrisée ont été également piqueux de l'équipage, tandis que Gilot, Cauvain, Robin étaient gardes. Après la guerre 39-45, il fallut un certain temps pour reconstituer l'équipage. La première chasse eut lieu en octobre 1949, Labrisée premier piqueux. Un cerf dix-cors fut pris dans la Faisanderie au carrefour du Puits de Berne. Le baron fut d'ailleurs presque mis K.0 par le cerf qui fut servi par Longjarret (garde). Les premières saisons furent difficiles et il fallut attendre trois ans au moins pour que les prises deviennent plus régulières. 26 cerfs furent forcés en 1954-55. 23, en 55-56. A la première chasse de la saison 1957, la 28 septembre, c'est Daguet qui est piqueux, Labrisée ayant quitté l'équipage. Le bilan réalisé fut prometteur : 35 cerfs sur 45 chasses. Malheureusement, une chute de cheval survenue au Baron, lors d'une séance d'entraînement, vint soudain compromettre l'avenir de ce bel équipage. La saison 1958-59 commença le 11 octobre. Voici ce qu'écrit « Actéon » chroniqueur de l'époque : « Assemblée à 11 h 3O au Cr des Mares de Jaux. Ciel couvert, bruine ; il a plu toute la matinée. L'assistance est relativement restreinte. Il manque de nombreux « boutons ». C'est Madame Monique Halphen qui dirige l'équipage en l'absence de M. J. de Rothschild, provisoirement immobilisé à la suite d'un accident. » Ajoutons qu'il n'y eut pas de Saint-Hubert cette année là un deuil récent ayant frappé le maître d'équipage. Celui-ci fera son apparition à la chasse, pour la première fois depuis son accident, le 3 janvier 1959 à Saint-Jean aux Bois, où il se contente d'entendre le rapport. La Première Chasse de la saison 1959-60, retardée par une sécheresse exceptionnelle n'eut lieu que le 24 octobre 1959. La Brisée est revenu à l'équipage. Le Baron J. de Rothschild suit désormais en voiture. La dernière chasse a lieu le 16 avril 1960. Elle se termine à la Michelette. Celui qui aurait du être le 30e cerf de la saison a été manqué. 1960-6l, Ies chasses repren- nent mais quelque chose ne va plus. Depuis son accident, le baron suit en voiture. Celles-ci sont de plus en plus nombreuses et le gênent considé- rablement pour suivre la chasse. Certains assistants indisciplinés lui refusent la priorité. Des « mots » s'ensuivent parfois. Ajoutons à cela le sacrifice financier qu'exige l'entretien d'un tel équipage. Le 15 avril 1961, s'il marque la dernière chasse de la saison, est aussi la date fatidique qui sera, dans les annales, celle de la fin de l'équipage « Par Vaux et Forêts ». « Actéon » écrit à ce sujet : « La dernière chasse de l'équipage « Par Vaux et Forêts » se termine sous le déluge et les mille tonnerres de l'apocalypse .... l'équipage ne désespère pas de relancer son cerf et remonte à Girardin. En vain. A huit heures et quart, redescendu au Bocage, il sonne la « rentrée au chenil » après avoir persisté, sous le déluge, pendant trois heures. Les derniers appels de trompe déchirent douloureusement l'obscurité. Pour la première fois, il nous semble que « le son du cor est triste, le soir, au fond des bois ». Le rideau noir de la nuit est retombé sur l'avant scène ; ça et là, de furtifs éclairs y brillent comme des larmes. C'est fini ». Une précision, l'équipage compte à son actif, à quelques unités près, 800 cerfs. Parmi toutes les chasses auxquelles a participé « Par Vaux et Forêts », on pourrait dresser une longue liste de faits méritant d'être soulignés. Je me bornerai à citer quelques chasses « hors série » relevées dans mes notes, d'ailleurs incomplètes, depuis la fondation de cet équipage :
-  10 février 1925 : une deuxième tête, attaquée en Ourscamp, débuche en Laigue et se fait prendre dans le village d'Autrèches.
-  3 mars 1925 : un dix-cors, séparé au Secnaux, va jusque dans les Bois de Cuise, retraverse toute la forêt jusqu'au marais du Carnois, débuche en plaine de Mercières, traverse l'Oise et tient les abois dans le villace du Meux, après 5 h l/2 de chasse.
-  23 mars 1926 : une troisième tête, attaquée en Ourscamp, débuche et se fait noyer par les chiens dans une mare près du Bac d'Arblincourt (Aisne) après plus de 25 Km en débucher. (Ces trois chasses avec « Par Monts & Vallons »).
-  31 décembre 1930 : un sanglier, attaqué au Hourvari, est pris au Bois d'Ageux (débucher et traversée de l'Oise).
-  14 janvier 1956 : rendez-vous à vaudrampont. Un cerf à sa seconde tête, attaqué entre le Four d'en haut et Valon, descend aux prés de la Ville, remonte à Saint-Etienne, longe les marais de Martimont pour gagner la plaine à Hautefontaine. Il passe près de la ferme de Pouy et continue sa progression au sud-est de Montigny-Lengrain. La chasse reprend la direction de Coeuvres et gagne le plateau de Saint-Pierre-Aigle. Les chiens descendent les pentes boisées près du village, traversent le marais et entrent en forêt de Villers-Cotterêt où le cerf est relancé. Il revient dans le marais où il est servi à l'entrée du village. Pendant que se déroule la curée, on entend soudain des abois dans le marais : c'est le cerf de Villers-Cotterêt qui est à l'hallali. La voix des chiens redouble mais aucun cavalier n'arrive. Finalement, Longjarret met fin à cet intermède inattendu, alors que la nuit est presque tombée. Des suiveurs sur le retour, préviennent la vènerie à Villers-Cotterêts.
-  31 mars 1956 : Rendez-vous à la Michelette. Pris i-un vieux dix-cors (mulet) après cinq minutes de chasse, le long des bois Doria. On attaque à nouveau sur trois autres mulets. L'un d'eux fait sa chasse dans la petite vallée des Eluas et dans les patures entre Orrouy et Gilocourt. Finalement, il est volontairement abandonné dans un petit bois de sapins près de Gilocourt. Les veneurs gagnent le carrefour Valon pour faire la curée du premier cerf. On apprend alors que la Brisée, appuyant une tête de chiens, est passé à Glaignes, et, dans un débucher sensationnel a poursuivi par Roquemont, Trumilly, Duvy, le Bois du Roi. Finalement, il a dû s'arrêter sur un défaut près du château de Droiselles.
-  6 avril 1957 : Long débucher d'un cerf mulet, attaqué au Cr de Picardie, jusqu'à Vivières.
-  19 mars 1958 : Un daguet attaqué à Saint-Etienne est pris à Moru, après avoir pris l'eau à Verberie.
-  15 mars 1958 : Un cerf mulet (de Chambord) attaqué à Epernon, est pris à Rivecourt après avoir traversé l'Oise aux grévières de La Croix.
-  6 février 1960 : Un cerf à sa troisième tête, attaqué près de Valon, va à Saint-Etienne, escalade le bois du Crocq, va buter à la route de Soissons, passe au-dessus de Couloisy, Croutoy, Jaulzy, fait un retour vers Pouy, et, finalement, se fait prendre dans le marais, près du village de Saint-Pierre-Aigle, à l'endroit même où l'on avait pris une seconde tête la 14 janvier 1956.
-  19 novembre 1960 : Un daguet, attaqué près de Saint-Hubert, est pris à Montigny-Lengrain. Après avoir démonté son brillant équipage « Par Vaux at Forêts » en 1961, James de Rothschild continua à suivre les chasses de sa fille Monique, qui avait fondé « La Futaie des Amis ». Il le faisait en voiture, accompagné d'Albert Desbouis. Il ne s'attardait guère après la prise et repartait aussitôt. Sans doute lassé par la trop grande affluence et l'automobile ne lui permettant pas d'être dans le vif du sujet, il délaissa à jamais les laisser-courre. L'on ne revit qu'une fois sa silhouette élégante : c'était à l'occasion de la Saint-Hubert du 3 novembre 1973 en l'église abbatiale de Saint-Jean-aux-Bois. Il ne fit qu'une brève apparition et repartit dès la fin de la messe. Né le 19 mars 1896, à Paris, il est décédé en cette ville le 6 août 1984. Il était le père de Nicole STEPHANE et de Monique de ROTHSCHILD.